En moins d’une décennie, le marché de l’immobilier de bureaux a été bousculé comme rarement dans son histoire récente. Télétravail massif, explosion des outils collaboratifs, nouvelles attentes en matière de bien-être au travail, montée du nomadisme professionnel : les repères traditionnels volent en éclats. Au cœur de ces transformations, le Groupe WS, avec son concept « Work & Sleep », incarne une réponse singulière à ces défis. Reste une question stratégique : quelles perspectives d’avenir pour ce modèle face aux nouveaux enjeux économiques et immobiliers ?
Un environnement économique en pleine recomposition
Depuis 2016, date de création de la société Groupe WS, l’économie tertiaire a connu plusieurs vagues de mutations structurelles. La plus visible concerne la relation des entreprises à leurs surfaces de bureaux. En Île-de-France, selon Immostat (T3 2024), le taux de vacance des bureaux a bondi de 65 % entre 2019 et 2024 pour atteindre plus de 5,2 millions de m² disponibles. Un chiffre qui illustre la fragilisation du modèle classique du bureau « figé ».
Cette évolution ne résulte pas seulement de la conjoncture. Elle s’inscrit dans une tendance lourde :
- généralisation du télétravail, accélérée par la crise sanitaire de 2020 ;
- montée en puissance des profils « travailleurs nomades » ou hybrides, présents au siège seulement quelques jours par semaine ;
- pression croissante sur les coûts immobiliers, poste de dépense majeur pour les entreprises tertiaires ;
- aspiration à davantage de sens, de confort et de flexibilité dans l’organisation du travail.
Les entreprises libèrent ainsi des centaines de milliers de mètres carrés, en particulier les surfaces anciennes, peu fonctionnelles, mal adaptées aux nouveaux usages : open spaces bruyants, bureaux rigides, absence d’espaces de repos ou d’infrastructures de bien-être. C’est précisément dans cet interstice, entre vacance immobilière et nouveaux besoins, que le Groupe WS a décidé de se positionner.
Work & Sleep : un concept hybride né avant la vague
Fondé en avril 2016, le Groupe WS mise d’emblée sur une intuition forte : l’avenir du bureau se jouera sur la capacité à proposer des espaces multifonctionnels, plus proches de l’hôtellerie que de l’immobilier tertiaire traditionnel. WS est l’acronyme de « Work & Sleep », une promesse simple mais radicale : permettre à un même espace de servir à la fois de bureau et de lieu d’hébergement d’appoint.
Le cœur de ce modèle repose sur un équipement emblématique : un bureau escamotable capable de se transformer en lit. Ce mobilier, développé par l’entreprise, incarne physiquement la fusion des usages :
- en journée, l’espace se présente comme un poste de travail complet, avec station de travail, matériel de visioconférence, lampe de travail, connexion wifi très haut débit (FTTO), luminothérapie ;
- en dehors des heures de travail, le bureau se replie et laisse place à un lit, permettant d’y dormir dans des conditions proches d’une chambre d’hôtel.
Chaque bureau intègre également un sanitaire avec douche et une mini-kitchenette, renforçant le caractère autonome et polyvalent de l’espace. Le design n’est pas laissé au hasard : loin des ambiances de bureaux « froids » et impersonnels, l’esthétique emprunte aux codes de l’hébergement et de l’hôtellerie pour offrir une atmosphère chaleureuse et rassurante.
Le concept ne se limite pas à un simple argument marketing. Il répond à plusieurs évolutions profondes du travail :
- la nécessité de pouvoir enchaîner réunions, visioconférences et déplacements sans perdre en confort ;
- la volonté de disposer de lieux où se reposer, faire une sieste, se doucher après une séance de sport ou un trajet ;
- la réalité d’une nouvelle géographie de vie : « on dort à Paris un jour ou deux par semaine, mais on vit à Lille, Nantes ou Reims », selon la formule qui résume bien la mobilité contemporaine.
Un modèle économique fondé sur la valorisation des bureaux vacants
Le modèle économique du Groupe WS est à la fois simple et adapté à cette phase de transition du marché. La société n’est jamais propriétaire des locaux qu’elle exploite. Elle signe des baux commerciaux de 9 ans sur des surfaces souvent délaissées, parfois obsolètes ou peu attractives dans leur configuration initiale.
Après signature du bail, les équipes WS conduisent une opération de rénovation et de restructuration des espaces pour les adapter à une double fonction :
- activité de bureaux pleinement opérationnels ;
- usage d’hébergement accessoire, conforme à la réglementation.
Pour les propriétaires d’immeubles, cette approche présente un double avantage :
- revaloriser des actifs en perte de vitesse, notamment des immeubles de bureaux anciens ou mal configurés ;
- s’assurer de la présence d’un opérateur unique sur la durée du bail, capable de générer une activité récurrente.
Pour WS, la logique consiste à capter cette vacance croissante, en Île-de-France mais aussi potentiellement dans d’autres métropoles, et à la transformer en produits immobiliers hybrides fortement demandés par une nouvelle génération de travailleurs.
Répondre aux nouveaux besoins du travail : bien-être, confidentialité, flexibilité
Le pari de l’entreprise repose sur une analyse fine des attentes émergentes dès 2016, bien avant que la crise sanitaire ne les accélère.
Première tendance : la prise en compte croissante du bien-être au travail. Douches au bureau, accès facilité au sport, salles de repos, siestes courtes entre deux réunions, accompagnement managérial, « happiness managers » : les entreprises ont intégré que la performance passe aussi par la qualité de vie au travail.
Le Groupe WS s’inscrit dans ce mouvement en intégrant nativement ces dimensions dans ses espaces :
- douches privatives dans chaque unité, permettant par exemple de pratiquer une activité sportive sur la pause déjeuner ;
- possibilité réelle de se reposer ou de dormir sur place, sans devoir quitter le lieu de travail ;
- ambiance chaleureuse, entre bureau et chambre d’hôtel, plus propice à la détente et à la concentration que de grands open spaces impersonnels.
Deuxième tendance : la démocratisation, puis la généralisation du télétravail. Ce phénomène a deux conséquences majeures :
- une baisse mécanique du besoin de m² de bureaux « permanents » pour les salariés ;
- une montée d’un usage ponctuel, flexible, souvent sur quelques jours par semaine ou par mois.
Les espaces Work & Sleep se positionnent comme des « bases arrière » pour ces travailleurs hybrides, consultants, cadres, indépendants, qui ont besoin :
- d’un bureau calme et équipé pour quelques heures ou quelques jours ;
- d’un hébergement d’appoint lors d’un déplacement régulier dans une grande métropole ;
- d’une alternative aux hôtels classiques et aux espaces de coworking bruyants.
Sur ce dernier point, le Groupe WS a fait un choix stratégique : proposer des salles indépendantes et insonorisées. Là où de nombreux espaces de coworking sont critiqués pour leur bruit ambiant, leurs open spaces favorisant les distractions et leurs difficultés de concentration, WS privilégie l’intimité et la confidentialité.
L’utilisateur dispose ainsi d’une unité complète, isolée, qui peut servir aussi bien :
- de bureau pour des visioconférences sensibles ;
- de lieu de préparation de réunions stratégiques ;
- que de chambre d’appoint pour la nuit.
Cette combinaison de flexibilité, de confort et de confidentialité constitue l’un des principaux atouts différenciants du modèle groupe ws, à un moment où les travailleurs réclament moins de mètres carrés, mais des mètres carrés beaucoup mieux pensés.
Perspectives de développement : vers une nouvelle catégorie d’actif hybride
Face aux nouveaux enjeux économiques, plusieurs pistes de développement s’ouvrent pour WS et, plus largement, pour ce type de concept hybride entre bureaux et hébergement.
La première perspective tient à l’ampleur de la vacance actuelle et à venir, en particulier dans les quartiers de bureaux construits dans les années 1980-2000, devenus moins attractifs. Ces surfaces, souvent difficilement transformables en logements classiques, peuvent en revanche être reconfigurées en modules Work & Sleep avec un investissement maîtrisé.
On peut envisager plusieurs axes de croissance :
- déploiement dans d’autres métropoles françaises confrontées à la même équation (télétravail massif, vacance de bureaux, hausse des loyers résidentiels) ;
- implantation à proximité des grands hubs de transport (gares TGV, aéroports, pôles multimodaux), où la demande d’hébergement-bureau d’appoint est structurellement élevée ;
- partenariats avec de grands groupes pour transformer une partie de leurs surfaces peu utilisées en espaces Work & Sleep internalisés, opérés par WS.
À moyen terme, ce type d’actif pourrait même constituer une nouvelle classe dans la typologie immobilière, aux côtés des bureaux traditionnels, des hôtels et du coliving : un immobilier d’usage mixte épousant la fragmentation croissante des temps de travail et de repos.
Enjeux RSE et attractivité des talents : un levier stratégique
Les perspectives d’avenir du Groupe WS ne se jouent pas uniquement sur la dimension immobilière ou économique. Elles s’inscrivent aussi dans une réflexion plus large sur la responsabilité sociétale (RSE) et l’attractivité des entreprises.
Les directions des ressources humaines sont confrontées à un double défi :
- attirer et fidéliser des talents qui peuvent désormais travailler à distance, parfois depuis n’importe quel pays ;
- offrir des conditions de travail compatibles avec une meilleure qualité de vie, sans renoncer à la performance collective.
En permettant à un salarié habitant en région de disposer d’un pied-à-terre fonctionnel, confortable, proche de son siège ou de ses clients, le concept Work & Sleep permet :
- de réduire le stress lié aux longs trajets aller-retour dans la même journée ;
- de limiter les coûts de nuitées d’hôtel pour l’employeur ;
- de proposer une solution plus durable que le 100 % présentiel ou que des déplacements incessants.
Par ailleurs, la requalification de bureaux vacants en espaces multifonctionnels intelligemment utilisés peut constituer un argument fort en matière de sobriété foncière. Plutôt que de construire de nouveaux bâtiments, il s’agit de mieux utiliser l’existant, en s’adaptant aux usages réels plutôt qu’aux normes héritées.
Pour le Groupe WS, l’intégration explicite de ces enjeux RSE dans son discours et ses projets pourrait devenir un puissant levier de différenciation, auprès des investisseurs comme des entreprises clientes.
Les défis à relever pour s’imposer durablement
Si les perspectives sont réelles, le modèle Work & Sleep devra cependant surmonter plusieurs défis pour s’ancrer durablement dans le paysage.
Premier défi : la lisibilité réglementaire. L’usage mixte bureau/hébergement pose des questions en matière d’urbanisme, de sécurité, de normes hôtelières ou para-hôtelières, et de baux commerciaux. Le positionnement de WS – « activité de bureaux avec faculté d’hébergement accessoire » – devra rester compatible avec les évolutions réglementaires, parfois rapides, des collectivités et de l’État.
Deuxième défi : la compétition avec d’autres formes d’immobilier flexible. Coworking, coliving, résidences de services, hôtels hybrides, appartements-hôtels : l’offre d’hébergement professionnel s’est densifiée. Pour se distinguer, WS devra continuer à affirmer ses marqueurs forts :
- espaces insonorisés et indépendants, loin des open spaces bruyants ;
- équipements techniques de niveau professionnel (visioconférence, très haut débit, luminothérapie) ;
- confort hôtelier dans l’usage nocturne.
Troisième défi : l’évolution incertaine du télétravail. Si la tendance lourde va vers davantage de flexibilité, certaines entreprises reviennent partiellement en arrière, réinstaurant davantage de présentiel. Le pari du Groupe WS repose donc sur la pérennité d’un modèle hybride – deux à trois jours de présence par semaine – plutôt que sur un télétravail intégral.
Enfin, l’entreprise devra composer avec un contexte économique volatil : hausse possible des taux d’intérêt, tensions sur les coûts de rénovation, incertitudes géopolitiques susceptibles d’impacter les déplacements professionnels. Dans ce cadre, la maîtrise fine des coûts d’aménagement, la capacité à structurer des baux avantageux avec les propriétaires et la pertinence du maillage géographique seront déterminants.
Vers une nouvelle normalité du travail et de l’hébergement
Au-delà de son cas particulier, le Groupe WS incarne une bascule plus profonde : la fin du cloisonnement strict entre les fonctions urbaines. Les lieux de travail empruntent aux codes de l’hôtellerie ; les hébergements temporaires se dotent d’équipements professionnels ; les temps de vie, de travail, de transport se mélangent.
Dans ce paysage mouvant, les acteurs capables d’inventer des espaces réellement hybrides, flexibles, chaleureux et techniquement performants disposent d’un avantage compétitif. Le concept Work & Sleep, pensé avant même l’explosion du télétravail, apparaît aujourd’hui comme une réponse concrète à un double impératif : faire mieux avec moins de mètres carrés, et offrir davantage de qualité de vie aux travailleurs, qu’ils soient salariés, indépendants ou entrepreneurs.
Les prochaines années diront si ce modèle parvient à passer du statut d’innovation de niche à celui de standard d’un marché réinventé. Mais une chose semble acquise : à l’heure où l’on peut « vivre à Reims et dormir à Paris une à deux nuits par semaine », la frontière entre bureau et chambre n’a sans doute jamais été aussi ténue. C’est précisément dans cet entre-deux que le Groupe WS a choisi de s’installer, et que se joueront, pour une bonne part, ses perspectives d’avenir.